Autour d’un concours international ouvert aux jeunes designers, le Festival réunit expositions et rencontres. À travers cette plateforme, la villa Noailles espère accroître son aide à la jeune création et faire se rencontrer, échanger et permettre une meilleure connaissance des créateurs par les professionnels, le public et les journalistes. Le Festival comprend deux volets : un festival de design à Hyères et un festival d’architecture d’intérieur à Toulon.
20h ― Ouverture officielle du 13e Festival International de design, Design Parade Hyères, en présence de Jean-Pierre Giran, maire d’Hyères, suivie d’un cocktail et d’un concert QParvis, villa Noailles, Hyères
20h30 – 22h ― Ouverture des expositions QPicasso dans la collection de Charles et Marie-Laure de Noailles Q QArthur Hoffner Q QJoachim Jirou-Najou Q QLouise Desnos Q QLisa Ertel Q QChristophe Machet Q QVincent Darré et Mathieu Cossé pour la boutique de la villa Noailles Q QHôtel La Reine Jane, 14 chambres / 14 designers Q QXénia Laffely Q QCarolien Niebling, lauréate 2017 Q QSavoir-faire régional, François Passolunghi Q QPhilippe Malouin, invité d’honneur Q
Design Parade Hyères
13e Festival international de design
du 29 juin au 1er juillet 2018
expositions ouvertes jusqu'au 30 septembre
villa Noailles
Montée Noailles 83400 Hyères
T. +33(0)4 98 08 01 98 /97
Horaires d'ouverture pendant le festival
Vendredi 29 juin : inauguration du festival et des expositions à 19h30
Samedi 30 juin : 10h00 - 18h00 Dimanche 1er juillet : 10h00 - 18h00
La villa Noailles est fermée les 2 et 3 juillet.
Horaires d'ouverture après le festival
(du 4 juillet au 30 septembre)
la villa Noailles est ouverte tous les jours de 14h00 à 19h00.
Nocturne le vendredi de 15h00 à 21h00. Fermés le mardi et les jours fériés.
Entrée libre
Design Parade Toulon
3e festival international d'architecture d'intérieur
du 28 juin au 1er juillet 2018
expositions jusqu'au 30 septembre
Ancien Évêché
69 cours Lafayette
Horaires d'ouverture pendant le Festival
Jeudi 28 juin : inauguration du festival et des expositions à 18h30
Vendredi 29 juin : 14h00 - 18h00
Samedi 30 juin : 11h00 - 18h00
Dimanche 1er juillet : 11h00 - 17h00
Horaires d'ouverture après le festival
Ouvert tous les jours de 11h00 à 17h00.
Dimanche, ouvert de 11h00 à 13h00.
Fermé le lundi et les jours fériés.
Entrée libre
GaM
la Galerie des Musées
22 - 24 rue Pierre Semard
Ouvert tous les jours de 12h00 à 18h00
Fermé le dimanche et le lundi
Entrée libre
La Rue des Arts
rue Pierre Semard
galerie de L'ÉSAD TOULON PROVENCE MÉDITERRANÉE
Place Gambetta
Le Stardust
20 rue Chevalier Paul
Accès à la villa Noailles
!!! Attention ne pas se fier au GPS
Suivre les itinéraires conseillés
1. Depuis Toulon :
rond-point Henri Petit
avenue Alexis Godillot
avenue Riondet
avenue Victor Basch
Chemin de la porte Saint Jean
Puis parking du Château
2. Depuis Le Lavandou
avenue Ambroise Thomas
avenue Jean Jaurès
avenue Nocart
rue Lamartine
boulevard d'Orient
rue de Verdun
rue de l'ascension
boulevard Matignon
avenue Paul Long
Montée Noailles
puis parking du château
Marché du design
Toulon
place du globe
jeudi 28 juin Midi à Minuit
vendredi 29 juin 10h00 - 16h00
Hyères
villa Noailles
samedi 30 juin 10h00 - 18h00
dimanche 1er juillet 10h00 - 18h00
Loïc Bard ⁓Anaïs Borie ⁓ Pablo Bras ⁓ Tom Chung ⁓ Marie Cronil ⁓ Sara de Campos ⁓ Julien Manaira ⁓ Alex Sizemore & Hank Beyer ⁓ Camille Viallet & Théo Leclercq ⁓ Alexandre Willaume
La collection se compose de bancs, de tabourets et de chaises en érable massif noirci par brûlage ou blanchi. La radicalité des deux tons choisis est tempérée par les détails veinés du matériau naturel et par l’anatomie sensuelle de ce mobilier que l’on croirait sculpté d’une seule pièce. Aucune arête ne saillit des jambages ni des assises dont les connexions disparaissent, comme si elles s’englobaient dans une matière imperceptible. Le designer gomme tout angle qui pourrait accrocher le regard ou la main, il souhaite ainsi éveiller le sens tactile des utilisateurs. On se surprend à découvrir l’objet par le toucher, l’apprivoiser avant de s’y asseoir et faire corps avec lui. L’analogie avec le corps humain se ressent dès la perception des silhouettes dessinées par une ossature compacte pour les chaises, un assemblage d’omoplates arrondies pour les tabourets, ou par de grands membres aux rotules douces pour les bancs. Le travail du designer s’adresse particulièrement aux personnes malvoyantes pour leur apporter le confort d’un objet qui ne heurte pas et qui appelle à la caresse. Loïc Bard aspire à créer des objets dont l’interaction nous connecte au réel, avec le moment à vivre et à ressentir.
La designer utilise le mythe de Prométhée comme la métaphore du rapport de l’humain à la technique. Par un triptyque composé de deux lampes et d’une horloge, elle opère un parallèle entre les étapes de la domestication de l’électricité et l’histoire du titan surmontant sa crainte des dieux pour dérober le feu et l’offrir aux hommes, puis leur transmettre la connaissance et les arts ; il sera éternellement supplicié pour cet outrage. Elle dessine volontairement des éléments figuratifs renvoyant aux archétypes de l’architecture hellénistique autant qu’à leurs interprétations post-modernes par des designers non moins iconiques. La première lampe, avec son socle en céramique évoquant le mont Olympe et sa foudre en tubes au néon, symbolise la première approche de l’électricité. Le chaos de câbles d’alimentation exprime la complexité de cette entreprise. La seconde matérialise la victoire de l’homme qui maîtrise enfin l’élément craint et convoité. La main triomphante au sommet d’une colonne tient fermement le tube de gaz qui s’éclaire lorsqu’on l’agite ; elle tourne à 360° sur son axe, animant ce trophée décoré de rameaux d’olivier. Cette allégorie trouve sa conclusion dans le troisième objet : une horloge digitale. Tel Prométhée attaché à un rocher subissant chaque jour le même tourment, les heures défilent imperturbablement sur un boîtier LCD arrimé au support en plexiglas par de multiples fils. La designer tente ainsi de questionner notre rapport à la technique et le rôle de l’objet en tant que support narratif.
En exposant trois exemples de mini-centrales électriques, le designer tente une approche alternative à la consommation destructrice. Il fait la démonstration que l’on peut, raisonnablement et en pleine conscience, canaliser et amplifier l’énergie disponible avec des outils simples pour limiter les conséquences de nos activités sur des ressources qui s’épuisent. Il combine des matériaux rustiques à des techniques contemporaines pour fabriquer des mécaniques simples et efficaces qui se destinent à l’usage domestique ou collectif.
La description du Complexe hydroélectrique pour espaces publics donne un aperçu de sa démarche. Une gouttière en pin brûlé, étanchéifiée à la filasse et au suif (fibre de chanvre enduite de graisse de bœuf) conduit l’eau à travers un tuyau flexible en PVC et néoprène vers un générateur imprimé en stéréo lithographie.
Ce dispositif produit l’électricité nécessaire au fonctionnement de petits appareils sans pour autant accaparer la source d’eau. Le tuyau se débranche facilement pour remplir une bouteille, un arrosoir et pourquoi pas un véhicule à moteur à vapeur. C’est un pari sur l’avenir que fait le designer.
L’ensemble est lesté au moyen de bases en granit et s’ajoute à un tube en acier cintré, gouttière supplémentaire, qui peut s’utiliser pour attacher un vélo. La mise en réseau d’éléments simples, trouvés, recyclés ou fabriqués, augmente les fonctions ou accélère la production d’énergie. Le champ de prospection reste ouvert et se partage dans une démarche de démocratisation des procédés de production.
Cette lampe astucieuse tire son nom d’un objet essentiel pour l’escalade qui fut la source d’inspiration esthétique et technique du designer : le piton, une broche métallique simple et robuste qui accueille les accessoires des alpinistes. Ces qualités se retrouvent dans une lampe composée d’aluminium anodisé et d’acrylique, elle s’éclaire grâce à des LED alimentés par batterie rechargeable sur simple port USB. Son autonomie et sa structure en font un objet tout-terrain qui peut aussi bien s’utiliser dans la maison qu’en extérieur. La prise en main est facilitée par la poignée cylindrique qui accueille l’ampoule ; le châssis ajouté, grâce à ses lignes multiples, autorise toutes les compositions et les combinaisons avec d’autres éléments (corde, crochet, pince, mousqueton). La lampe (stabilisée par un lest interne) se pose sur un côté ou l’autre, elle s’accroche à un mur aussi bien qu’à une branche, elle se suspend… Les possibilités sont infinies et permettent de contrôler l’orientation du faisceau lumineux. Le designer a fait appel à des fabricants de l’Ontario, région industrielle où le métal est travaillé à grande échelle. La lampe répond aux contraintes de la production de masse et peut être recyclée localement.
En s’appropriant deux techniques éloignées, la designer compose un paysage contemporain inspiré par les couleurs du sud de la France.
Le jaspé, artisanat traditionnel des faïenciers d’Apt, est utilisé pour décliner une famille de formes pratiques ou décoratives, réunies par l’utilisation des matériaux et des motifs qui les constituent. L’argile, le kaolin, l’ocre et le charbon sont travaillés en plaque puis estampés dans des moules avant cuisson et émaillage. Ce mélange de matières naturelles dessine des strates colorées galbées par les courbes des contre-formes que la designer interprète tantôt en camouflage abstrait, tantôt en illustrations de la géologie régionale ou en évocations de la faune locale. Les contours organiques des objets se répondent, passant du vase à l’accessoire.
Les tapisseries sont produites par le détournement du principe industriel de production de feutre qui consiste à piquer la laine pour en mélanger les fibres. Marie Cornil a conçu sa propre machine pour diriger librement le sens des brins, ajouter des couleurs et créer des effets de broderie en surface. Elle utilise sa machine comme un pinceau pour « peindre » en teintes chaudes des motifs feutrés sur la base d’un textile néoprène. Par son approche picturale, une nouvelle palette naît des fils entremêlés et produit au hasard des piqûres et des accumulations de matière.
Issue d’une famille de viticulteurs, la designer a souvent observé et pratiqué la récolte de la vigne. Elle met ses compétences à profit pour perfectionner la préservation des grappes, point essentiel dans la production du vin. En effet, la bonne manipulation et la conservation des grains de raisin évitent leur oxydation et limitent le recours aux produits chimiques. Elle constate également le manque d’ergonomie des accessoires portés par les vendangeurs. De ces observations résultent un panier pour les petites récoltes et une hotte pour un usage intense.
Le panier est produit en polyéthylène haute densité lui conférant sa robustesse. Les parois et le fond ajourés permettent de réduire la quantité de matière plastique et d’alléger son poids. La prise en main est facilitée par de larges poignées. Les caissettes évasées s’empilent quand elles sont stockées à vide ou se superposent perpendiculairement grâce à des encoches placées sous la base. Ainsi, les grappes sont toujours ventilées et réparties en petites quantités pour éviter tout écrasement. La hotte répond aux mêmes qualités pour une contenance supérieure. Elle s’emboîte dans une structure tubulaire en aluminium portée dans un sac à dos en textile nylon. Le dos du récoltant est ainsi protégé, et les larges sangles qui enveloppent ses épaules et sa taille lui assurent plus de confort. Pour décharger sa récolte, il lui suffit de poser le panier sur le plateau du camion et d’en glisser un nouveau sans détacher ses bretelles.
Les propriétés physiques de la résine époxy sont au centre du procédé de production de cette série de petit mobilier et d’étagères. Plutôt que de concevoir le moule comme une limite pour contraindre la matière, le designer travaille le plastique encore liquide dans des formes ouvertes en opérant des inclinaisons et des rotations souples, que seule la pratique manuelle autorise. Les couches translucides sont déposées successivement pour façonner des épaisseurs qui forment les surfaces et se soudent pour donner la structure, les opacifient et en dessinent les contours singuliers. Le fabricant est alors créateur, réagissant au comportement de la résine et définissant constamment l’harmonie de l’objet en construction. La main est l’instrument essentiel, sensible et intelligent du producteur qui lui permet d’accompagner la matière dans sa transformation en objet fini, elle lui permet d’évaluer sans cesse l’esquisse d’origine pour obtenir une sculpture fonctionnelle inédite et inattendue. Les colorations du glacis synthétique soulignent les options de modelage pour donner à voir à l’utilisateur les étapes délicates de ces objets singuliers.
Dans une démarche sociologique et philosophique, le duo a entamé un périple dans le nord des États-Unis à la découverte des matériaux locaux et des personnes qui les travaillent, des industries ou de l’artisanat qui se sont développés autour des ressources et des traditions régionales. Ils ont parcouru l’Ohio, le Kentucky, le Michigan et l’État de New York pendant une année. Ce périple initiatique les a poussés à remettre en question leur responsabilité de designers confrontés à l’uniformisation des produits de masse et à l’idée selon laquelle un matériau bon pour l’industrie est un matériau bon pour l’humanité. À travers cette série étonnante, ils célèbrent des valeurs qui ne se chiffrent pas, la richesse de l’expérience humaine et la charge émotionnelle qui se dégage de l’artefact.
L’ordinateur (avec son écran, son clavier et sa souris) est retenu comme un des archétypes les plus représentatifs de l’universalisation des produits. Assimilé par tous, il est l’exemple idéal pour défier les automatismes passifs et interroger le rapport à l’objet et à sa conception. Avec humour et parfois ironie, les deux designers en livrent des versions inspirées de leur voyage : en argile, en charbon, en glace, en lard, en calcaire, en tourbe, en cire d’abeille, en plante verte ou en grès. Autant de matériaux et de modes de fabrication inattendus pour ouvrir sur la réflexion et la discussion.
Le duo s’interroge sur la place du designer dans le contexte urbain et souhaite aborder le « matériel partagé » avec la liberté habituellement concédée au mobilier destiné aux particuliers. Le banc leur apparaît comme l’objet fondamental de l’espace public et devient leur champ de recherches : « S’asseoir sur un banc, c’est faire l’expérience commune et simultanée d’un dessin, c’est partager un même support matériel. » Quelques premiers constats s’imposent ; l’assise communautaire définit un lieu et induit une durée, elle s’inscrit dans le paysage, elle réunit et dirige le regard. Leurs recherches les poussent à considérer le confort, l’accueil, la convivialité et la robustesse adaptés à l’usage collectif. Nourries d’une quarantaine de maquettes et de nombreux dessins, leurs expérimentations se concrétisent aujourd’hui dans la production de l’Exèdre. Ce banc réunit toutes les caractéristiques listées au préalable. La couleur jaune le signale, sa forme semi-circulaire rassemble autant qu’elle invite les piétons à marquer un détour dans leur trajectoire. L’assise en bouleau est supportée par huit pieds en acier laqué, chacun surmonté d’un dossier ergonomique. Cette multiplicité symbolise l’association d’individualités pour soutenir une base commune. Le pied central s’étire pour accueillir une horloge. Les designers proposent ainsi de réinstaurer le traditionnel point de rendez-vous, le temps d’une pause.
Conçue comme un espace de vie modulable condensé, la station permet de concentrer plusieurs fonctions dans un espace réduit et s’adapte aux besoins uniques de chaque utilisateur. Plutôt que de réaliser une collection d’objets et de mobilier à accumuler, le designer dépouille ceux-ci de tout superflu pour n’en garder que la structure essentielle. Ainsi, autour de rails posés ou suspendus, il dessine des éléments dont la forme signale immédiatement l’usage et le maniement. La banquette est constituée de lattes de bois aux couleurs douces posées sur châssis en acier et s’inscrit dans un périmètre délimité par deux câbles parallèles fixés au plafond. Ces lignes portent les éléments verticaux (miroir, paroi vitrée, tuteur en céramique pour les plantes) et alimentent en électricité les lampes ou les veilleuses qui s’y accrochent en un clic. Des contrepoids et des poulies facilitent l’ajustement des pièces de la station. Quelques unités maçonnées complètent le dispositif. La simplicité et la sobriété de l’ensemble laissent à l’usager toute liberté de le personnaliser et de se l’approprier par l’ajout de matelas, de coussins et d’objets personnels. Le designer s’imagine comme le concepteur d’outils pour une micro-architecture, le producteur de « briques » qui s’assemblent et se modulent à l’envi.
Philippe Malouin ⁓ Carolien Niebling ⁓ Arthur Hoffner ⁓ Picasso ⁓ François Passolunghi & Joachim Jirou-Najou ⁓ La Reine Jane ⁓ Xénia Laffely ⁓ Superpoly
Voilà une manière subtile, quoiqu’ingénieuse, d’envisager le monde du design. Rares sont les objets qui jouissent d’une telle élégance intérieure, d’une douceur silencieuse, comme ceux créés par Philippe Malouin durant ses dix premières années d’activité.
Son parcours dans l’univers du design est manifestement exceptionnel. L’ensemble de l’œuvre créée par le designer canadien (1980), après l’ouverture de son studio à Londres en 2008, peut être considéré comme une suite d’épisodes esquissant une trajectoire singulière et réfléchie, complétée d’une vision précise du design. Elle révèle dans son ensemble une cohérence entre théorie et pratique, une ambition difficile à atteindre.
Cette cohérence n’a cessé de se renforcer au fil du temps, ses objets gagnant en présence au sein de l’espace qu’ils occupent. Il semble que contrairement à d’autres exemples de mobilier d’appoint, qui s’efforcent de disparaître, Malouin est parvenu au niveau où ses créations prennent l’ascendant sur l’espace qu’elles occupent. Ses premières expérimentations présentent ce caractère remarquable, notamment Grace, son projet de fin d’études, une table gonflable pouvant accueillir dix personnes au besoin (pour la monter, l’exercice est vigoureux) ou sa chaise compacte Hanger Chair (elle aussi créée en 2008), qui peut être pliée lorsqu’elle est inutilisée et pendue pour libérer de l’espace. Quelques années plus tard, il crée Typecast Aluminum Chairs (2013), un ensemble de sièges d’apparence fragile aux pieds ultra fins pourtant solides. Traversé d’un rythme continu, son travail inclut quelques explorations spéculatives comme dans l’Alvin Mobile volant (2010) ou la bougie suspendue Pendulum (2013) : deux installations qui jouent avec l’air, et le feu pour la deuxième. Un changement subtil de tempo s’opère au cours de démonstrations à grande échelle de son savoir-faire, comme dans la Mollo Armchair pour Established and Sons (2014), au design plus affirmé que ses précédentes propositions. Le dernier projet brutaliste de Malouin, le banc de béton monumental, Core Bench (2017). Réalisée pour Superbenches, cette installation publique commissionnée par Felix Burrichter au cœur d’un parc de la banlieue de Stockholm, est un autre exemple de l’audace de ses parti-pris. Il est aujourd’hui produit en édition limitée pour Salon94 et disponible en version d’intérieur sous le nom de Core Stool (2018).
extrait du texte de Maria Cristina Didero publié dans le catalogue Design Parade
Résidences en partenariat avec Sèvres - cité de la céramique et CIRVA (Centre international de recherche sur le verre et les arts plastiques à Marseille) ~ Exposition réalisée avec le soutien de Puntoseta
Sèvres - Algues comestibles
Inspirée par l’emplacement en bord de mer de la villa Noailles à Hyères, j’ai décidé de consacrer ma résidence à Sèvres et au cirva aux plantes aquatiques. Il s’agit d’une variété de plantes sous-estimées et variées, aussi bien par leur aspect que par leur comestibilité.
La beauté de cette flore fascinante lui est conférée par son habitat aquatique.
La demeure aquatique des algues a façonné leur nature de plusieurs manières : par exemple, leur flottabilité a permis aux algues libres de réduire leur besoin d’une structure résistante au profit de tissus photosynthétiques. Certaines algues (à l’exemple de l’algue nori ou de la laitue de mer) sont en fait uniquement composées d’une feuille d’une ou deux cellules d’épaisseur.
Elles sont exceptionnellement tendres et délicates.
Sur les assiettes apparaissent en relief différentes algues comestibles trouvées dans les supermarchés et les magasins alimentaires spécialisés.
Lors de mes visites dans ces magasins, j’y ai acheté toutes les variétés d’algues disponibles avant de me rendre compte qu’elles étaient souvent découpées en petits morceaux, soit séchées, soit salées. Aussi, leurs couleurs étaient sombres et repoussantes. Les algues sont une source de nourriture récemment découverte, ou plutôt récemment réintroduite. Comment alors les algues, malgré leur apparence peu appétissante, ont-elles pu devenir si à la mode ? Je voulais « graver » les algues dans l’assiette et révéler leur forme naturelle, à l’état libre dans l’eau.
À Sèvres, nous avons moulé de véritables algues directement dans le moule, une méthode qui a mis à mal la mémoire réfractaire de la porcelaine. Enfin, nous avons créé neuf moules correspondant à six algues achetées dans le commerce. Ces compositions d’algues dévoilent et magnifient leurs caractéristiques, de la diaphane laitue de mer à l’épaisse laminaire.
Sur trois assiettes ont été peintes trois algues différentes. Grâce aux mains habiles des artisans, une algue véritable semble apparaître dans chaque assiette. Ces assiettes sont une proposition d’articles de vaisselle qui vont permettre d’éduquer à la consommation d’algues alimentaires et créer un désir inconscient autour de ce nouveau type d’alimentation.
Cirva - Fleurs sous-marines
Les fleurs jouent un rôle significatif dans notre culture. L’étude de leur histoire nous apprend que leur transparence, leur parfum délicat et leur grâce magique leur confèrent un mystérieux pouvoir d’attraction, qui n’aurait apparemment pas été apprécié de tout temps.
La science et la compréhension des conditions d’apparition de chaque chose devraient d’après moi faire partie de tout processus de design.
L’évolution constante et sans limite des fleurs me fascine. L’admiration que ces merveilles odorantes ont suscitée, m’a permis de prendre conscience que les fleurs sont de véritables témoins de notre vie. Elles nous accompagnent dans ses moments les plus importants.
Pour le Cirva, j’ai dessiné une série de vases qui permettent de décorer l’intérieur de nos maisons avec des plantes aquatiques. Les culs-de-vase, à la couleur intense, permettent aux racines de se déployer, dans du sable ou des pierres si nécessaire. La panse du vase est marquée par sa forme gonflée et sa transparence. Son col est d’une couleur subtile, plus sombre, pour orienter un peu plus le regard vers sa panse.
Les trois tailles différentes ont été conçues pour contenir une grande variété de plantes aquatiques. Le plus grand des vases est idéal pour abriter des plantes aquatiques de grande taille, tels les nénuphars profondément enracinés au fond des lacs et à la longue tige qui les ramène à la surface. Le vase le plus large est parfait pour des plantes flottant allègrement à la surface de l’eau ou juste au-dessous, telles la jacinthe ou la salade d’eau. Le plus petit vase est l’écrin d’un bel éventail de plantes micro-aquatiques, de la lentille d’eau ou de la cabomba.
« On aimerait découvrir un mythe des passages avec une source légendaire, écrit Walter Benjamin, une source d’asphalte qui jaillirait au cœur de Paris. Les brasseries, où la bière coule à flots, tirent leur existence de ce mythe des fontaines. » Réminiscences mythologiques greffées sur la vie banale, celles-ci ponctuent l’espace prosaïque et s’y installent comme des puissances oniriques, et s’imposent comme de petits mémentos brutalistes.
C’est de cette charge symbolique et triviale que les choses d’Arthur Hoffner héritent. Objets domestiques, ses fontaines font plus que réinvestir les typologies décoratives : vases, tapis, parures. Elles en conservent la presque inutile beauté et la grèvent d’un poids métaphorique. Petits tonneaux des Danaïdes en PVC, elles agrafent Esculape à la pièce industrielle. Elles miment des cornes d’abondance. Vaisselle en plastique et fragments de tuyauterie recyclés, pièces de céramique précieuses et morceaux de corde arrachés au rayon bricolage, elles intriguent le regard.
Surtout, elles parlent et nous demandent ce qu’est la mémoire d’un designer. Souvenirs de la fable, souvenirs de Duchamp, souvenirs de Droog ou de Sottsass… Reprise formelle des jeux illusionnistes : vrai marbre et fausse éponge, circuit technologique et fausse magie, vraie banalité et faux mouvement perpétuel. Rencontre d’une collection baroque et du lexique moderne. Intersection pop de la couleur. Palimpsestes et déséquilibres.
Le temps qui passe, fait-il ici, retour comme l’eau remonte la verticale d’un tasseau de bois ou d’un bloc de marbre creusés et motorisés? Projeté dans l’objectivité quotidienne, est-il résurrection loufoque du refoulé au cœur d’un design fatigué de fonctions et d’usages? Ou morsure mélancolique et regret de la sculpture — socles, figures — que tentent de camoufler taches roses et orangées derrière le bruit de l’eau qui coule?
Picasso, la collection Charles et Marie-Laure de Noailles
Charles et Marie-Laure de Noailles se marient en 1923 et font construire sur la Côte d’Azur, à Hyères, une des premières demeures représentatives du mouvement moderne. A la suite de cette réalisation ils deviennent, en quelques années, d’inestimables soutiens pour de nombreux artistes, écrivains ou institutions.
Mécènes du XXe siècle, ils connaissent toute l’importance de Picasso. C’est Jean Cocteau qui, en 1917, prononce pour la première fois devant Marie-Laure qui n’a que 15 ans, le nom magique de l’artiste Espagnol. Charles de Noailles, quelques mois après leur mariage, pour consoler son épouse, alors alitée, acquiert le « plus petit Picasso du monde ». Cette Maison dans les arbres de 1919 marque le début de leur collection d’art moderne.
Après des tentatives pour commander un portrait de la vicomtesse - qui ne sera jamais achevé - les Noailles se contenteront d’acheter quelques unes de ses œuvres. Bien évidemment Picasso, dont la position se renforce de jour en jour, n’a pas besoin de leur aide. S’ils ne deviennent pas des amis proches, les Noailles n’en demeurent pas moins des collectionneurs attentifs.
Ainsi, à Paris comme à Hyères, ils accrochent toiles et dessins, et possèdent au moins une quinzaine d’œuvres du peintre. En 1928, ils dépensent 175 000 francs pour une Nature morte au sable réalisée à Juan-les-Pins en 1925 - une somme record pour une œuvre de leur collection. Le tableau sera accroché dans une mise en scène soignée conçue par le décorateur Jean-Michel Frank.
Ces deux œuvres (issue d’une collection particulière et de Musée national d’art moderne) seront présentées lors de l’accrochage d’été de l’exposition permanente Charles et Marie-Laure de Noailles, une vie de mécènes, accompagnées d’un ensemble d’archives issus du musée Picasso et des scrapbooks de Marie-Laure de Noailles pour permettre d’éclairer la relation peu connue entre des grands collectionneurs et l’un des artistes majeurs du siècle dernier.
La cartographie des savoir-faire régionaux que la villa Noailles explore dans le cadre de Design Parade depuis 2010 marque cette année un arrêt sur images — signées Louise Desnos — sur la blondeur intemporelle, bien que vintage, du rotin. Le nom à lui seul déjà sonne comme une invitation « french touch » au farniente en terrasse dans un palace mythique de la côte d’Azur ou dans un de ces innombrables cafés parisiens qui font que Paris reste toujours une fête. Ou, plus modestement mais non moins délicieusement, une invitation à la lecture, à l’heure de la sieste dans une pinède, avec les cigales en bande son, comme derrière des persiennes filtrant en douceur la lumière mise doublement en abyme par le tressage tout en plein et déliés du rotin. C’est d’ailleurs ce jeu tendre et sensuel, entre la lumière et les ombres portées, qui a servi de fil rouge à Joachim
Jirou Najou pour concevoir la scénographie de l’exposition qui prend place au gymnase de la villa.
Proche souvent de l’osier dans sa façon d’être tissé mais différent du bambou (lequel est creux), cette longue liane accrochée à certaines espèces de palmiers tropicaux est indissociable du mobilier slow life méditerranéen. Pour preuve, ces méridiennes, fauteuils, bains de soleil, têtes de lit, miroirs et autres garde-corps pour jardins surplombant la mer à Saint-Jean-Cap-Ferrat ou au cap d’Antibes que François Passolunghi, dernier rotinier en activité dans les Alpes Maritimes crée et restaure dans son atelier de Contes, au-dessus de Nice. Un savoir-faire appris auprès de son père, fils de vannier lui aussi, et une passion vibrante pour ce matériau qui se courbe, tisse, tresse et dont la moelle peut même être filée, comme le textile avec lequel, soit dit en passant, il se marie si bien par coussins interposés. Le film réalisé par Louise Desnos, projeté en format vertical pour faire écho au nouveau mode de visionnage sur smartphones et souligner combien il serait vain de vouloir enfermer le rotin dans la seule nostalgie des trente Glorieuses, offre une immersion virtuelle dans l’atelier de François Passolunghi où la liane est redressée à l’étuve ou au chalumeau, puis courbée contre un gabarit en bois, lui donnant ainsi sa forme définitive. Un travail de la main qui se rapproche parfois de celui du sculpteur. Nommée éclisse ou lame selon son écorçage ou non, la peau du rotin s’emploie, elle, pour le tissage et pour les ligatures. Rien ne se perd donc, et ce profil écologiquement correct — si l’on excepte l’empreinte carbone due au voyage depuis les pays asiatiques où il pousse en abondance (Indonésie, Malaisie, Philippines, Vietnam) — correspond parfaitement aux attentes des Millennials qui redécouvrent avec enthousiasme dans les brocantes (y compris celles en ligne) cette alternative au bois blond scandinave. Car si le rotin est arrivé en Europe, d’abord aux Pays-Bas puis en Angleterre et en France à la fin du XIXe dans le sillage des colonies et du goût pour l’exotisme qui en découlait, il a surtout connu un essor populaire des années 1940 aux années 1970, avec la démocratisation des congés payés et des résidences secondaires. Aux côtés de pièces de designers modernistes qui s’envolent sur le marché du vintage comme
les sièges Soleil et Citron de Janine Abraham et Dirk Jan Rol (auxquels la galerie Pascal Cuisinier a consacré une rétrospective l’an dernier), ou le Tripode de Joseph-André Motte on trouve encore facilement l’anonyme mais archétypal fauteuil coquille dont il existe sans doute autant de variantes que d’artisans, un peu comme la recette de la ratatouille. Sans surprise donc, les jeunes designers révélés à Design Parade écrivent aujourd’hui, en toute liberté, de nouveaux chapitres contemporains à cette saga design & rotin. S’il fallait ne retenir qu’un exemple, cela serait sans doute la lampe murale orientable, sorte de paravent graphique pensé pour moduler la lumière, que Giorgia Zanellato et Daniele Bortotto (Zanellato-Bortotto) ont imaginé, avec la complicité de François Passounghi pour l’une des cinq chambres de la résidence d’artistes du moulin des Ribes à Grasse, cet autre beau projet ancré dans le terroir méditerranéen et lancé par Silvia Fiorucci Roman, en partenariat avec la villa Noailles, qui a été inauguré début mai.
François Azambourg ~ Bless ~ Valentina Cameranesi & Enrico Pompili ~ Julien Carretero ~ Sébastien Cordoleani ~ Thomas Defour & Antoine Grulier ~ Jean-Baptiste Fastrez ~ Constance Guisset ~ Claire Lavabre & Adrien Goubet ~ Odd Matter ~ Julien Renault & Amaury Caeyman ~ Inga Sempé
Scénographie de l’exposition :
Thomas Defour et Antoine Grulier (Superpoly)
Photographies :
Lothaire Hucki
En 2016, David Pirone, fan de design, décidait de redonner vie à un hôtel mythique de la ville : La Reine Jane, belle endormie située sur le petit port de plaisance du quartier de L’Ayguade.
Reconnaissable à son balcon en porte-à-faux et sa façade blanche, le bâtiment a le charme des constructions de la Riviera des années 1950, il fut le décor de quelques scènes du film Pierrot le fou, tourné par Jean-Luc Godard à l’été 1965 dans la cité des palmiers.
Le décor était planté, restait à imaginer les aménagements intérieurs.
Loin d’une approche nostalgique, le propriétaire a opté pour la sélection de quatorze designers pour concevoir autant d’interprétations contemporaines que de chambres disponibles.
Il a fait appel à Jean-Pierre Blanc, fondateur du festival Design Parade, qui, en plus de dix ans, a vu nombre de jeunes talents se révéler, et a exposé au grand public le travail de quelques-uns des créateurs majeurs d’aujourd’hui. L’amitié née de ces collaborations avec le centre d’art a facilité le choix de ces designers.
Pour eux, l’exercice de la chambre d’hôtel est particulier. Le séjour temporaire et l’anonymat des vacanciers autorisent à marquer plus fortement l’habitat que s’ils le concevaient pour un client particulier. Chacun a dessiné l’ensemble de sa chambre et de sa salle de bains, du sol au plafond, et l’a aménagé d’un lit, d’un bureau, d’une chaise et de lampes, pour proposer une immersion totale et inédite aux voyageurs.
I am not the person you think I am, but I don't know who I am
Xénia Laffely travaille sur la question de l’espace intime et du « self-care » en créant divers objets entre décoration, objets magiques et objets utilitaires.
Couvertures, fontaines d’intérieur, coussins ou miroirs, elle s’intéresse à la géographie limitée qu’est l’espace domestique. Elle investit ce lieu intime et essentiel, souvent déconsidéré, dans lequel on peut exister nu au sens propre comme au sens figuré. En créant des ensembles d’objets et d’images, Xénia Laffely tente d’apporter une dimension plus narrative mais aussi plus engagée sur le sens de ces espaces privés comme lieu de ressourcement.
Une couverture est à la fois un support d’image idéal en termes de surface et aussi un objet usuel et réconfortant. Symboliquement, elle fait référence à la notion d’intimité et de chez soi, des réflexions qui intéressent tout particulièrement la créatrice. L’espace domestique, et le lit plus particulièrement, permet de s’affranchir du regard des autres et d’acquérir une forme de liberté ultime dans une perspective féministe, comme l’a évoqué Virginia Woolf dans son essai Une chambre à soi, comme l’a conceptualisé plus récemment Mona Chollet dans son ouvrage Chez soi et comme l’a montré l’exposition « Women House » qui s’est terminée en janvier 2018 à la Monnaie de Paris.
Chaque couverture est inspirée par une femme, fictive ou réelle, appartenant à son matrimoine personnel. La couverture devient alors à la fois une mise en scène subjective de ces figures et de cet héritage collectif, une possibilité de « safe-rest », une zone portative et un manifeste pour l’espace domestique comme espace légitime de vie. Elle évoque aussi la possibilité d’une union charnelle avec l’image de ces femmes.
Le travail textile de Xénia Laffely se caractérise par un aller-retour constant entre la main et la machine, associant l’efficacité de l’impression digitale sur textile à une dimension artisanale plus irrégulière et intrigante.
La première étape de ce travail est la réalisation de dessins digitaux qu’elle imprime et sur lesquels elle intervient manuellement, ou l’inverse. Ces compositions hybrides sont ensuite imprimées sur tissu, puis enrichies de nouveaux tissus à la manière d’un patchwork. Des broderies faites à la machine ou à la main viennent ensuite enrichir le vocabulaire textile de l’image initiale. Le matelassage, réalisé spontanément à l’aide d’une machine à bras libre, fixe définitivement cette composition visuelle devenue «texturelle ».